En un peu plus d’une dizaine d’années, les dérailleurs électriques – et plus particulièrement le Shimano Di2 avec les déclinaisons Dura-Ace et Ultegra – sont progressivement devenus incontournables à partir d’un certain niveau de gamme.
Souplesse d’utilisation, confort, précision et rapidité sont les avantages connus des systèmes Di2. Mais êtes-vous certain de connaître toutes les possibilités offertes par ce type de transmission électrique ?
Les avantages du Di2
Le confort d’utilisation est souvent mis en avant : il suffit d’appuyer sur un bouton sur le levier de changements de vitesse pour changer de pignon ou de plateau, alors qu’avec un dérailleur mécanique, il faut manipuler un levier jusqu’à ce qu’il atteigne le point d’indexation qui permet au dérailleur de se caler face au bon pignon, avec un mouvement souvent plus ample. Le Di2 ne fait pas rouler plus vite, mais il facilite les changements de vitesse, surtout dans le froid ou lorsque la fatigue générale s’installe à la fin d’une longue sortie.
Une précision qui dure dans le temps.
L’autre avantage principal concerne une précision qui dure dans le temps. Une fois les dérailleurs bien réglés, ils ne peuvent pas bouger, sauf en cas de choc (si la patte de dérailleur arrière se tord par exemple). Alors que dans le cas d’une transmission mécanique, un câble peut rouiller, se détendre ou coulisser moins bien à l’intérieur de sa gaine. Le réglage des dérailleurs est relativement simple à effectuer en roulant, en cas de changement de roue en course par exemple, alors qu’avec un système à câble, il faut la plupart du temps régler directement l’indexation sur le dérailleur arrière.
Le boîtier de connexion
L’opération avec le Di2 s’effectue sur le bouton du boîtier de connexion, positionné sous la potence, au bout du cintre, sur le cadre ou dans la tige de selle selon les marques de vélo. Un appui prolongé donne accès aux réglages des dérailleurs pour ajuster l’indexation avec des petites impulsions sur les manettes. Ce bouton permet aussi de changer le mode de changements de vitesse, dont nous reparlerons plus loin.
Le système propose également un alignement automatique de la position du dérailleur avant en fonction du pignon choisi à l’arrière pour éviter les frottements. Ajoutons que le Di2 rend plus facile l’intégration des fils électriques dans le poste de pilotage ou le cadre qu’une transmission à câble, pour plus d’esthétisme et un meilleur aérodynamisme.
Voilà pour le tour des principales innovations appréciées parmi les utilisateurs de ces systèmes, mais il y en a encore bien d’autres à découvrir.
Des options souvent négligées
Beaucoup d’utilisateurs du Di2 s’en servent de la même manière qu’une transmission par câble. C’est dommage, car la transmission électrique offre des possibilités de personnalisation du poste de pilotage ou du mode de changements de vitesse souvent négligées, et qui méritent qu’on s’y attarde.
Avec le Di2, vous avez la possibilité de monter des commandes de changements de vitesse satellites, sur d’autres points d’ancrage que les manettes de freins/dérailleurs. Ainsi, un bouton supplémentaire peut être installé sur la partie basse du cintre, appelé “commande sprinter” chez Shimano, qui permet de changer de pignon d’un coup de pouce avec les mains en bas du guidon. Un autre bouton peut aussi être installé en haut du cintre, appelé “commande grimpeur”, pour changer de pignon tout en conservant les mains en haut. Ces mêmes commandes satellites peuvent bien sûr être placées sur les prolongateurs des triathlètes ou pour les vélos de contre-la-montre, ce qui permet toujours de disposer d’une double commande sur deux endroits différents du poste de pilotage. La liaison entre les différentes commandes est facilitée par un simple fil électrique, beaucoup plus simple à faire cheminer à l’intérieur du guidon ou sous le ruban de cintre qu’un câble en acier.
Mais ce n’est pas tout. Sur le plan mécanique, une manette de changements de vitesse pour dérailleurs électriques est beaucoup moins complexe qu’une manette pour des vitesses à câble. Sur la manette Di2 il y a trois boutons (avec un troisième bouton caché sous la cocotte en caoutchouc), reliés à une partie électronique. De ce fait, on peut faire faire ce qu’on veut à ces boutons, en les utilisant comme des changements classiques, avec la manette de droite pour commander le dérailleur arrière et la manette de gauche pour le dérailleur avant, ou tout inverser. C’est utile pour les personnes avec un handicap par exemple, ou pour suivre des préférences particulières. Le bouton supplémentaire sous la cocotte peut servir à changer de vitesse, ou à commander les pages de menu d’un compteur compatible, et à la condition d’installer un petit capteur bluetooth dans le système. Cette dernière option permet de disposer d’informations sur la transmission, directement affichées sur le compteur, comme l’état de la batterie ou le rapport engagé.
Il est également possible de personnaliser l’action de chaque bouton, soit en agissant sur la rapidité des changements de vitesse à chaque impulsion, soit sur le nombre de pignons changés après un appui prolongé. On peut par exemple choisir de balayer la cassette entière en conservant le doigt appuyé sur la manette, ou seulement un, deux ou trois pignons, pour éviter les fausses manoeuvres.
Changements de vitesse séquentiels
L’intérêt principal selon nous de cette personnalisation réside dans le choix des modes de changements de vitesse. Car le Di2 (aussi bien au niveau Dura-Ace qu’Ultegra) propose des options de changements de vitesse synchronisés ou semi-synchronisés. Cela signifie qu’il est possible d’utiliser la transmission comme une boîte de vitesse séquentielle. Il existe trois modes, que vous pouvez sélectionner par un double clic sur le bouton du boîtier de connexion :
- Le mode “synchronisé” : à chaque impulsion sur le levier de commande du dérailleur arrière, le système enclenche le développement directement inférieur ou supérieur, et met en action automatiquement le dérailleur avant pour suivre la plage de rapports. Vous pouvez choisir via l’application sur quel pignon de la cassette le changement sur l’autre plateau s’effectue, et vous pouvez toujours commander manuellement le changement de plateau
- Le mode “semi-synchronisé” : quand vous passez du petit au grand plateau ou l’inverse, le dérailleur arrière compense automatiquement la différence de développement en changeant tout seul le pignon à l’arrière, de manière à stabiliser la fréquence de pédalage. Selon les dentures de la cassette, c’est l’utilisateur qui choisit le nombre de pignons qui sont changés à chaque opération.
- Le mode classique, en utilisant les dérailleurs électriques comme des dérailleurs à câble.
Un logiciel et une application faciles d’accès
Tous ces réglages et personnalisations s’effectuent à partir d’un logiciel sur PC (E-TUBE PROJECT Cyclist Cyclist), avec un câble pour établir la connexion avec le système Di2. Il permet d’indiquer l’état des différents composants (pour détecter d’éventuels dysfonctionnements), de maintenir les micro-logiciels des parties électroniques à jour, et offre donc la possibilité de paramétrer les commandes. Ce logiciel gratuit est le même qui sert à communiquer avec le capteur de puissance Shimano, ou avec les systèmes pour vélos électriques Shimano Steps.
Pour paramétrer les modes de changements de vitesse, il faut entrer les dentures des plateaux et de la cassette, et le système montre le rapport de chaque combinaison disponible. Vous avez ensuite la possibilité de choisir à quel moment et sur quel développement le changement automatique de plateau s’effectue dans le cas où vous choisissez le mode synchronisé.
Avec un couple de plateaux de 53 et 39 dents et une cassette de 11 à 28 dents par exemple, vous pouvez décider qu’à chaque impulsion pour mettre un développement plus petit, la chaîne monte jusqu’au 53/25, puis bascule ensuite automatiquement sur le 39/21 (le développement directement inférieur). Vous pouvez aussi bien sûr choisir qu’elle ne monte que jusqu’au 53/23 avant de basculer sur le 39/19, selon vos préférences. Dans l’autre sens, vous pouvez décider que la chaîne reste sur le petit plateau jusqu’au 15 dents, avant de basculer automatiquement sur le 53/19 à l’impulsion suivante sur le bouton. Et tout ceci s’effectue dans la plus parfaite fluidité, grâce à la puissance des dérailleurs et à la forme des plateaux, qui favorise des changements extrêmement précis.
L’E-TUBE PROJECT Cyclist Cyclist est aussi disponible en tant qu’application pour smartphone ou tablette, ce qui se révèle bien pratique pour ceux qui ne disposent pas d’un PC. Dans ce cas, le système communique en bluetooth grâce au petit capteur en option (le D-Fly) que nous avons déjà évoqué pour la liaison avec le compteur. Les différents réglages de la transmission sont tout aussi faciles que sur la version PC.
Le poids réel du Di2
Les quelques rares détracteurs du système Di2 mettent en avant un poids prétendument supérieur par rapport aux transmissions classiques à câbles. Qu’en est-il vraiment ? Si vous comparez le poids de plusieurs groupes, il faut tenir compte de toutes les pièces utiles à leur fonctionnement, ce qui comprend bien sûr le poids des câbles et des gaines nécessaires à l’utilisation des dérailleurs mécaniques, et remplacés par des fils électriques légers sur le Di2. Un poids qui compense souvent la présence d’une ou plusieurs batteries sur un groupe à transmission électrique. Les dérailleurs avec un mini moteur sont aussi plus lourds que des dérailleurs mécaniques, mais à l’opposé les manettes de freins/changements de vitesse sont plus légères (avec des composants électroniques à la place d’un mécanisme).
Sur la balance, le Shimano Dura-Ace Di2 11 vitesses (freinage à patins) est finalement 20 g plus léger que la version mécanique. Pour la version Disc, on arrive à un poids équivalent, à 5 g près. Au niveau Ultegra, la différence atteint même une soixantaine de grammes, toujours à l’avantage du Di2, que ce soit pour le freinage à patins ou pour le freinage à disque.
Une fiabilité éprouvée
Enfin, la question de la fiabilité d’un tel système se pose souvent, à juste titre d’ailleurs si vous pensez à l’investissement supplémentaire nécessaire pour s’équiper en Di2. Chez les pros, on ne trouve plus à ce jour de coureurs qui roulent avec des dérailleurs à câble, même si quelques champions réfractaires comme Fabian Cancellara au début du Di2 ou Peter Sagan sur quelques éditions de Paris-Roubaix ont laissé planer le doute à ce sujet. Désormais, les coureurs roulent avec des dérailleurs électriques quels que soient le terrain ou les conditions, ce qui tendrait à démontrer la fiabilité du système Di2. L’argument peut être considéré comme discutable quand on connait les moyens de certaines équipes professionnelles, pour lesquelles changer un dérailleur ou une batterie n’est pas vraiment un problème de finances. Cependant, on ne peut que constater l’utilisation massive aussi aujourd’hui de cette technologie en cyclo-cross, en gravel et même en VTT avec les coureurs équipés par Shimano, et dans les conditions les plus extrêmes : pluie, boue, poussière, chocs, lavages fréquents au jet à haute pression…
Si pannes il y a, elles proviennent la plupart du temps de la batterie, quand elle n’a pas été rechargée. Cela est sans conséquence à long terme. Car évidemment, il faut penser à recharger régulièrement la batterie principale, mais qui dispose néanmoins d’une autonomie de 2 à 4000 km selon les conditions d’utilisation. De quoi voir venir sans se stresser. Finalement, l’un des rares accrocs avec le fonctionnement de la batterie pouvant survenir avec le Di2 provient du stockage du vélo, avec un bouton de commande qui reste sous pression durant de longues minutes lorsqu’il est posé contre un autre objet par exemple, ce qui vide la batterie. À vérifier lors des transports par exemple.
Un pas vers l’avenir
Contrairement au freinage à disque ou aux pneus tubeless par exemple, la transmission Di2 ne divise pas les utilisateurs ou les potentiels acquéreurs, la plupart s’accordant sur le confort d’utilisation, la précision, la fiabilité et la facilité d’entretien.
Seul le prix plus élevé de ce type de transmission par rapport à des dérailleurs classiques peut freiner les plus hésitants, mais ces tarifs vont de pair avec la montée en gamme globale de tous les vélos du marché. De plus, avec cette technologie déclinée sur le groupe Ultegra, légèrement moins luxueux que le Dura-Ace et pas beaucoup plus lourd, on constate un fonctionnement aussi précis, durable, complet, exactement les mêmes caractéristiques, avec des prix plus accessibles.
Enfin, les différentes fonctionnalités bien présentes mais que certains vont peut-être encore découvrir, permettent d’envisager d’autres innovations à l’avenir, avec d’autres perspectives et pourquoi pas l’apparition de changements de vitesse entièrement automatiques, avec des dérailleurs connectés à un capteur de cadence ou de puissance.
Rédigé par 3bikes.fr